Enfant, en Autriche, Christine Turnauer a toujours été attirée par le peuple gitan, la musique, la danse. En Europe de l’Est, quand il y avait des fêtes, on invitait habituellement des musiciens tziganes se souvient la photographe. « Ces fêtes, avec les tziganes, c’était toujours le bonheur total ». Les rencontres avec les gitans se sont ainsi poursuivies tout au long de sa vie.
Rencontre avec Christine Turnauer à la Fondation Manuel Rivera-Ortiz.
C'est dans les années 70 lorsque Christine Turnauer était assistante d’un célèbre photographe de mode qu'une rencontre devient décisive. A cette époque, les gitans se retrouvaient dans le marché aux puces de Saint-Ouen. Ceux-ci fabriquaient des objets en cuir ou en métal et vivaient dans des roulottes. « C’était magnifique ! Je me souviens d'une famille de gitans devant une caravane, il y avait une femme avec ses filles. Je suis allée immédiatement vers elles pour leur demander de m’apprendre à danser. Elles ont accepté ! » Mais comme Christine était en jeans . « Elles me disent : On va t’habiller. Elles m'ont mis une jupe avec un foulard et m'ont appris à danser. C'était fantastique parce que la grand-mère savait comment danser, presque immobile, d’un simple mouvement des seins. C'était très érotique. C'est avec elles que j'ai appris à danser. Puis elles m’ont proposé d’épouser un gitan qu’elle me présenteraient lors des prochaines Pâques. » Comme la photographe n’était pas à Paris pour Pâques et elle n’a pas épousé un gitan.
La magie des rencontres s'est poursuivie en 2014 que lorsque la photographe réalise une commande en Roumanie sur des programmes d’aide au gitans vivant alors dans une misère extrême. Elle est réalise ainsi de nombreux portraits. S’ensuivent de nombreux voyages en Hongrie et en Roumanie lors desquels la photographe remarque que les gitans pratiquent exactement les mêmes métiers que les peuples nomades qu'elle avait observé dans un précédent voyage en Inde.

© Christine Turnauer
Djevrija and her daughter Selma, Kosovo, 2016
courtesy KLV Art Project
C'est un second déclic pour la photographe qui réalise depuis – à travers l'Europe en Roumanie, en Bulgarie, en Hongrie, au Kosovo et au Monténégro jusqu’en Inde – littéralement le portrait de la dignité des Gitans. Ce grande œuvre a été présenté sous ce titre rassembleur La Dignité des Gitans, à la fondation arlésienne Manuel Riviera Ortiz en partenariat avec le Forum Culturel Autrichien et KLV Art Projects.
Dans chacun de ces portraits composant cette remarquable exposition, on retrouve sans doute l'esprit du photographe. « J’ai toujours suivi mon instinct et c'est ce qui me fascine. Ma passion, ce qui m’intéresse, ce sont les êtres humains, les rencontres et la dignité des êtres. Le sens de cette exposition, c’est de montrer la dignité de ce peuple. En Europe et en Inde, il y a beaucoup de préjugés contre les gitans. J'espère que si l'on regarde ces photos, cela changera un peu les idées préconçues ; si c'est politique, alors oui absolument. J'espère que cela changera au niveau humain. Nous pouvons dire que les gitans ne sont pas seulement européens, ils sont un peuple du monde. Parce qu'ils ont été presque partout. »
Courant sur trois niveaux de la fondation MRO, l’exposition présentée ce printemps à Arles provoque sur le spectateur un effet remarquable. Ces regards nous poursuivent et nous touchent. Ils nous racontent tous une histoire forte, à la fois singulière et celle de tout un peuple, de l’Inde à l'Europe. Les tirages sont remarquables on ressent un travail presque artisanal et une passion à la fois, bien sûr pour les gitans qui sont représentés, mais pour le regardeur, le spectateur. Celui-ci peut parcourir dans les nuances de gris des images de Christine Turnauer, toutes les nuances du désir de vivre.
Didier de Faÿs pour Photographie.com
Tous les jours, sauf le lundi, de 11h à 13h et 14h à 19h // La vente des billets cesse 30 mn avant la fermeture // Vernissage le jeudi 14 avril à 18h // Finissage le jeudi 9 juin 2022 à 18h
TARIFS
Plein : 5€ - Réduit* : 3€ // Gratuité sur justificatifs : Arlésiens (sur présentation d’un justificatif de domicile) ; étudiants en individuels (français et étrangers) jusqu’à 25 ans ; moins de 18 ans ; bénéficiaires du RSA ; personnes en situation de handicap et leur accompagnateur ; journalistes ; conservateurs de musées ; adhérents de l’ICOM // *Réduction sur justificatifs : enseignants ; groupes à partir de 10 personnes ; demandeurs d’emploi
Commissaire exposition Karine LISBONNE, karine@klv-artprojects.com