C’est en 2021 que j’ai rencontré et découvert le travail de Daniela Paoliello.

J’étais alors immergée dans la préparation d’une exposition, d’une semaine de tables rondes et d’un open-call dédiés à la Photographie documentaire brésilienne. J’en étais la curatrice et la co-organisatrice en vue des Rencontres d’Arles avec Glaucia Nogueira, fondatrice de l’association Iandé, qui valorise cette photographie en France.

A la galerie Huit, nos Rituels Photographiques allaient proposer au public une merveille d’échanges culturels en off, autour de l’énergie de résistance d’artistes visuels brésiliens

aussi engagés que doués, de leurs narratifs charnels, vivants et reliés, dans une liberté d’interprétation totale, aux questionnements ultracontemporains d’un pays immense et plus que jamais laboratoire culturel de nos futurs possibles – enviables ou dystopiques.

Aimantées par son univers et ses images, nous y avions sollicité Daniela pour une soirée de regards croisés avec la photographe et plasticienne Angela Berlinde, sur la thématique de du décloisonnement et de l’hybridation de l’espace naturel et du féminin.

Car avec une approche de la photographie comme véritable dispositif d’une connaissance de soi, du monde et de soi dans ce monde, et outil d’une mise en risque assumée du corps féminin, cette jeune artiste semble se situer quelque part entre Susan Sontag et Ana Mendieta. A quelques trois ou quatre décennies de distance, dans un prolongement authentique, synthétique et comme libérée de déterminations intellectuelles ou strictement systémiques.

J’oserais la définir comme une passionnée, une engagée poétique et plus que tout, une ultracontemporaine dans la pertinence documentaire de ses sujets et de ses choix. Forgée à partir de fictions imaginaires à la fois expérimentales et ancrées dans la matière, sa photographie nous fait entrer dans un inconscient du monde, un état des forces en présence. Elle y inscrit la fragilité de notre intervention, tout en questionnant d’une manière humble et totale notre place future.

Ses images intègrent la relation du corps à la nature, à travers les notions de perte de soi, de fusion, de dilution et de révélation, Elle confie à la clarté nocturne et au temps long d’exposition les artifices de l’invisible et du merveilleux. Et se met en jeu et en risque dans une auto-performance bouleversante, exclusivement destinée à la caméra. Ce temps de prise de vue très lent, comme une énigme à traverser, permettant une hybridation entre corps et paysage, chair, traces et territoires instantanément reconnus.

Prairies émeraudes sous la lune effacée, rivages délicats ou hallucinés, à l’image de nos inconscients de dormeurs ultramarins ; jeux de ciels inversés, limons palimpsestes ; fragiles lucioles glanées à la main, errances cosmiques ; hybridations optiques et esquisse d’un corps obscurément mis en jeu - pourtant fluide et bien à sa place, dans l’immensité minérale de la nuit. « Creuser l’obscurité », en effet, pour y faire affleurer des ciels.

Sophie Artaud

Les images de Daniela Paoliello intègrent la relation du corps à la nature, à travers les notions de perte de soi, de fusion, de dilution et de révélation, Elle confie à la clarté nocturne et au temps long d’exposition les artifices de l’invisible et du merveilleux. Elle se met en jeu et en risque dans une auto-performance bouleversante, exclusivement destinée à la caméra. Ce temps de prise de vue très lent, comme une énigme à traverser, permettant une hybridation entre corps et paysage, chair, traces et territoires instantanément reconnus.