Fallait-il tout repenser ? Inventer un nouveau rite de passage en ce moment si particulier ? Substituer à cette année blanche une nouvelle édition en technicolor ? Dans l’urgent du présent, il s’est agi avant tout d’un engagement. Celui des Rencontres d’Arles auprès des photographes, artistes, commissaires, des partenaires et des institutions, avec lesquels le festival a noué des liens si forts depuis de nombreuses années. Loin d’envisager une tabula rasa nous invitant à rompre avec ce temps en suspens induit par la pandémie, il s’est ensuite agi de réfléchir à actualiser un héritage, celui de l’édition de 2020 construite par Sam Stourdzé autour du thème de la résistance, de cette photographie qui, selon ses mots, “se dresse, s’oppose, dénonce [...] réenchante”. J’ai souhaité construire la programmation à partir de ces prémisses, en traçant des prolongements, des variations, des échos, de nouvelles complémentarités ou courts-circuits permettant de saisir aussi une intensité, une urgence à ce que les Rencontres d’Arles prennent le pouls de l’état du monde. Si l’horizon n’est pas encore dégagé, si la lumière sera cet été encore tamisée, il faut rendre perceptibles les éclats démultipliés saisis par les photographes et artistes invités.
Si Pier Paolo Pasolini avait saisi combien la tension entre les puissantes lumières du pouvoir menaçait les lueurs survivantes des contre-pouvoirs, Georges Didi-Huberman nous redonne l’espoir dans la Survivance des lucioles (2009). Il s’agit avec lui de “reconnaître dans la moindre luciole une résistance, une lumière pour toute la pensée”. La photographie continue à émettre des signaux lumineux et à ouvrir l’espace pour de nouveaux modes de résistance.
Au cœur de l’été arlésien, cette année sera comme une constellation de lucioles, faite de mille feux illustrant la diversité des regards, la polyphonie des récits et symbolisant la survivance à travers l’image des espoirs et des prises de conscience.
Sous la direction de Christoph Wiesner, directeur des Rencontres d’Arles